Noor Bahjat Al Masri, artiste-peintre syrienne 

Née à Damas, en Syrie en 1991
Vit et travaille à Dubaï, aux E.A.U

Noor Bahjat Al Masri est née et a grandi en Syrie. La condition politique actuelle en Syrie l’a contrainte de quitter le pays avec sa famille il y a près de cinq ans pour l’émirat de Dubaï et son désert miroitant. Elle est diplômée avec mention honorable de la Faculté des Beaux-Arts de l’Université de Damas, et sa dernière exposition et résidence artistique à Dubaï se sont déroulées à Ayyam Gallery en 2015. Noor Bahjat est également la première artiste récipiendaire du tout premier programme d’artiste en résidence de la Galerie Stephanie à Manille, aux Philippines, en 2016.

Pour marquer la fin de sa résidence à la Galerie Stephanie à Manille en juin 2016, l’artiste Noor Bahjat Al Masri a préparé son exposition solo Which One is Your Thread? (Lequel est votre fil ?). L’exposition explore la constatation que malgré le fait que nous soyons à notre époque tous connectés virtuellement, nous ne nous sommes jamais sentis autant isolés. Influencée par l’environnement naturel des Philippines durant son séjour à Manille, les œuvres de Noor reflètent son désir croissant de vivre à un rythme plus lent et régulier. Depuis son arrivée à Manille, Noor a appris, avec un laisser-faire apaisant, à prendre son temps. La flore et les formes naturelles peuplent l’oeuvre qu’elle a accomplie ici aux Philippines, et représente un léger, quoiqu’important décalage symbolique par rapport à son oeuvre antérieure. Il y a des nuances d’incarnat et d’autres couleurs diluées qui tempèrent et collaborent avec la puissance de son sujet. C’est pour réaliser ce type d’équilibre qu’elle a travaillé avec vigilance et labeur durant les trois derniers mois, un équilibre en toutes choses, non seulement dans la création artistique, mais aussi dans l’ensemble de sa vie et de son existence. La gravité de ses pouvoirs d’observation nouvellement renforcés lui a permis de se positionner, non seulement dans ce monde relié à tout, mais aussi de questionner cette position même. Ici, elle interroge ses propres qui, quoi, comment et où. Les privilèges, les devoirs, les espoirs, les rêves et les désirs, la guerre et la paix, ‒ pour Noor, tout est un état d’esprit. Chacun est finalement la somme de ce qu’il fait de sa propre existence.

Sous toutes les structures pavées qui relient les nations et les civilisations, il y a un réseau grillagé hautement complexe et multicouche de routes virtuelles et de fils intangibles, et de chaînes qui lient tout et rien en même temps. Ce paradoxe fonctionne parce que l’époque présente expose sous nos yeux un système complexe et exponentiel de consommation aveugle et de gratification à la minute, nous ensevelissant à la fois dans l’isolement et dans la connexion. Ce système fait de la consommation un sport de masse, omettant cependant la nécessité d’une digestion minutieuse. Dans toute l’histoire de l’humanité, jamais nous n’avons été autant connectés, et jamais nous nous sommes sentis autant isolés.

Le travail de Noor Bahjat nous amène aussi à faire face à cette situation critique. L’un de ses portraits, révèle une femme qui brandit son encéphale presque comme une offrande, comme pour dire : « Je me rends, maintenant il est le vôtre ». Dépourvue de cheveux, de peau et de cuir chevelu, est exposée une boîte crânienne ensanglantée au sommet de laquelle se trouve, placide  ̶  en guise de couvre-chef  ̶   une méduse. Sa placidité est trompeuse. Dans toutes les vingt mille lieues sous les mers, la méduse est, par excellence, l’une de ses beautés les plus infâmes et dangereuses. Elle est d’une magnificence hypnotique et translucide  ̶ diaphane comme du tulle flottant  ̶ et à son corps de gaze arachnéenne est annexé un ensemble de tentacules qui ondulent deci delà. Elle vous hypnotise dans une brume de transe, et tout à coup vous êtes sous son contrôle, comme pris dans son étreinte. Un picotement électrique d’abord, puis une piqûre agonisante et aigüe, blanche et chaude, s’ensuit. Ceci est une métaphore appropriée pour « le système », cette puissance omniprésente et omnipotente quasi mythique fabriquée par l’homme, qui habilement et invariablement enroule et enveloppe ses tentacules autour de tout ce qui vit et respire.

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